Négociations Bruxelles trouve un accord pour le transit des céréales d’Ukraine
La Commission européenne a annoncé un accord avec cinq États de l’Union européenne, dont la Pologne et la Hongrie, pour garantir le transit des céréales ukrainiennes, après des interdictions d’importation imposées par ces pays et jugées « inacceptables » par Bruxelles.
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Annoncé le 28 avril 2023, cet accord « préserve à la fois la capacité d’exportation de l’Ukraine afin qu’elle continue à nourrir le monde, et les moyens de subsistance de nos agriculteurs » dans l’Union européenne, a souligné sur Twitter la présidente de l’exécutif européen, Ursula von der Leyen. L’accord prévoit la fin des interdictions d’importation, en échange de « mesures de sauvegarde exceptionnelles » concernant quatre produits jugés « les plus sensibles » : blé, maïs, colza, graines de tournesol.
La Pologne, rapidement imitée par la Hongrie, la Slovaquie et la Bulgarie, avait unilatéralement banni à la mi-avril les céréales et d’autres produits agricoles venus de l’Ukraine, disant vouloir protéger ses agriculteurs. Un bras de fer s’était alors ouvert avec la Commission, seule compétente pour déterminer la politique commerciale de l’Union européenne. Cet accord est annoncé alors les gouvernements des États membres ont donné leur accord pour reconduire la suspension des droits de douane sur les produits ukrainiens importés dans l’Union européenne.
Silos saturés
Les Vingt-Sept avaient suspendu en mai 2022, pour un an, les droits de douane sur les denrées ukrainiennes. Ils s’étaient organisés pour permettre à Kiev d’exporter ses céréales, l’invasion du pays par la Russie paralysant les itinéraires habituels par la mer Noire. Conséquence : les États de l’Union européenne voisins ont vu massivement augmenter les arrivées d’Ukraine, provoquant la saturation des silos faute de moyens logistiques appropriés et faisant chuter les prix, de quoi déstabiliser les agriculteurs locaux.
La situation a entraîné d’importantes manifestations d’agriculteurs et la démission du ministre polonais de l’Agriculture. « L’accord de principe » conclu vendredi avec cinq pays (Pologne, Hongrie, Slovaquie, Bulgarie, Roumanie), et approuvé par Kiev, vise à « répondre à la fois aux préoccupations de l’Ukraine et à celles des pays frontaliers », a expliqué le commissaire au Commerce, Valdis Dombrovskis. Au-delà des « mesures de sauvegarde exceptionnelles » déjà prévues, des évaluations seront menées sur d’autres produits comme le soja et l’huile d’olive.
Les restrictions prises par certains des pays de l’Est visaient également des produits comme le miel, le lait, la viande, les fruits et légumes ou encore le vin. Bruxelles a promis le 19 avril une aide supplémentaire de 100 millions d’euros pour les exploitants agricoles affectés, après une première enveloppe de 56,3 millions d’euros à la fin de mars, des fonds tirés de la réserve de crise de la politique agricole commune.
« Calmer les marchés »
Surtout, l’accord garantit la possibilité de faire circuler les céréales et produits agricoles ukrainiens via les cinq États, à destination de pays tiers, un point crucial pour Kiev, soucieux de pouvoir continuer à exporter sa production. Le transit, suspendu par Varsovie pendant presque une semaine, avait déjà officiellement repris le 21 février, mais en maintenant la stricte interdiction de les écouler sur le marché polonais.
« Notre détermination et notre persévérance, mais aussi une démarche constructive du côté de l’Union européenne », ont permis d’arriver à un compromis susceptible de « calmer la situation sur les marchés agricoles », a réagi vendredi le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki. « Calmer les marchés agricoles peut conduire à calmer l’opinion publique polonaise, c’est donc une démarche en vue de soutenir l’Ukraine » dans son combat contre la Russie, a-t-il même fait valoir, cité par l’agence PAP.
Même satisfaction du côté de la Hongrie. « C’est un grand succès, nous avons obtenu un changement de cap de Bruxelles qui a entendu les revendications de nos agriculteurs », s’est félicité le ministre de l’Agriculture, Istvan Nagy sur Facebook. Dopées par la levée des droits de douane et les « itinéraires » facilités mis en place par Bruxelles, les importations de blé ukrainien dans l’Union européenne (en volume) ont explosé de 960 % en 2022 par rapport à 2021, tandis que celles de maïs bondissaient de 62 %, selon des chiffres officiels.
Kiev dénonce des « restrictions inacceptables »
Le 29 avril, l’Ukraine a annoncé avoir remis à Pologne une note dans laquelle elle dénonce les restrictions commerciales « inacceptables » que ce pays, un de ses principaux alliés face à l’invasion russe, impose aux produits agricoles ukrainiens. « Des notes concernant la situation complètement inacceptable (qui découle) des restrictions commerciales sur les importations de produits agricoles en provenance de l’Ukraine » ont été adressées à la représentation diplomatique polonaise ainsi qu’à celle de l’Union européenne, a dit le porte-parole du ministère des Affaires étrangères à Kiev, Oleg Nikolenko.
Kiev a appelé à la reprise « immédiate » des exportations et a déclaré que les restrictions avaient violé l’accord d’association entre l’Ukraine et l’Union européenne « et les principes et les normes du marché unique de l’Union européenne. »
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